Toutes les personnes qui ont eu
la chance de pratiquer les arts martiaux très jeunes sont unanimes : la boxe
thaï dégage quelque chose de vraiment à part ! Libre, sauvage et détonnant à la
fois, rien n'enclave la dureté de ce sport. Pourtant, il serait injuste, voire
réducteur que d'insister sur ses techniques de frappes, ses blocages atomiques
ou ses corps-à-corps furieux sans en regarder sa magnificence.
Car si la Boxe
Thaï fut puisée dans les fleurons de l'efficacité... elle a comme valeur d'âme
de forger des combattants au mental d'acier.

Si je vous parle si librement
d'une de mes passions, c'est que jadis, j'ai eu l'honneur et l'avantage de
mettre les gants. A cette époque, en termes de BPP (boxe pieds-poings), nous ne
comptions que deux disciplines : la boxe française et le full. Dans le dojo où
je me rendais régulièrement, il y avait un atelier boxe et, entre deux cours,
de Kung-Fu ou de Ju-Jitsu. Nous étions de fervents adeptes du contact. A force
de persévérance, je fis la connaissance d'un pratiquant qui avait un brin
d'avance sur nous. Ses techniques, notamment de blocage avec les jambes, me
paraissaient très étranges. Alors, histoire de comprendre, je le questionnais
sans relâche jusqu'au jour où celui-ci m'avoua qu'il avait un frère qui
pratiquait le Kick Boxing. En effet, une section venait de s'ouvrir au Yamatsuki
et, séance tenante, j'allais voir de visu cette nouvelle discipline. Inutile de
préciser qu'une fois le seuil franchi, je fus envoûté.

Le Yamatsuki dégageait quelque
chose d'extraordinaire. Ce genre d'atmosphère est difficilement explicable avec
des mots. Il faut imaginer un lieu très martial où se mélangent sérénité,
application, sueur et désir de se surpasser. Une sorte d'endroit magique qui
transporte ses élèves en un lieu qu'eux-mêmes n'espéraient jamais frôler...
Cependant, à force d'apprentissage, la vérité était bien là ! Des rounds de
corde, de pao, d'abdos, de sac, de shadow, de technique et de combat allaient nous
forger un corps, un mental et surtout nous ouvrir la perception d'une nouvelle
philosophie. Je n'oublierai jamais l'enseignement de notre Maître Roger Paschy,
les leçons de Daniel Allouche, les instructions d' A. et R. Desjardin, de W.
Soudareth ou de M. Jami. En conclusion : pratiquer une si belle discipline en
compagnie de tels hommes ne pouvait que nous rendre meilleurs.
- SUPER FIGHT
& K-1 Rules -
Voilà comment tout à commencé et,
depuis, cette passion ne m'a pas quitté. Je vais régulièrement applaudir les
combattants et, des catégories C aux ténors, je suis toujours impressionné face
à la détermination des pratiquants. De ce fait, qu'elle ne fut pas ma surprise
de découvrir qu'un Fight-Night allait être organisé à deux pas de chez moi,
c'est-à-dire au Mach-36 tout près de Châteauroux.

Cette salle, habituellement
réservée aux concerts, est une bénédiction, elle est spacieuse mais pas
gigantesque, ce qui apporte une vive chaleur pour ce type de rencontres. De
plus, son acoustique s'avère très correcte et son aspect moderne lui confère
une structure mixant esthétisme et solidarité. Bref, quand tu pénètres dans
l'enceinte, tu es immédiatement séduit. A cela, rajoutons une énorme cerise sur
le gâteau car les organisateurs nous ont offert une soirée absolument
grandiose ! En effet, outre un plateau de combattants hallucinants, saluons
une déco de feu (sans jeu de mot), une restauration super sympa, une ambiance
affûtée et un speaker qui a chauffé la soirée avec tact, humour et
professionnalisme. Je vous ai mis l'eau à la bouche ? OK, c'est
parti !

Ce sont les combats amateurs qui
vont ouvrir les festivités. Illico, l'adrénaline monte et les jeunes coqs nous
prouvent qu'avec des tripes et du cœur, on enflamme rapidement les foules. Les
jeunots ont fortement préparé la salle. Du coup, on enchaîne sans mollir avec
du K-1 Rules et du Super Fight en 5x2 : Charles "Karlito" François
(de Metz) et Kichima Yattabare (de Meaux) nous ont offert un très beau combat,
remporté aux points par le Messin. Puis Zair Bechar (d'Orléans) nous a expliqué
la définition exacte du termes « Low Kick ». Mais ce n'était que
l'échauffement face à l'affrontement qu'allaient nous livrer les deux titans
que sont Johann Fauveau et Yazid Boussaha.


La vache !... ça, c'est du
kick ! Les mecs se sont rendus coup pour coup et si l'un a fait parler les
poings, l'autre a fait rugir ses guibolles. Les techniques (notamment de coups
de genoux) de super Yohann vont porter ses fruits et, à n'en pas douter, le jeune
homme a bien deux cœurs et quatre poumons. Hyper méga fight... Respect,
Messieurs !
- CHAMPIONNAT DU MONDE -
Tandis que les sculpturales
danseuses font monter la température de 3 000 degrés, je fais un tour d'horizon
et, ma foi, la salle est solidement remplie. A côté de moi, ça discute ferme
sur le prochaine combat et, alors qu'on attendait le fameux Brice Guidon, nous
avons eu Farid El Farci. Brice blessé, Farid a eu la lourde tâche de le
remplacer et donc de tirer contre un Lituanien enragé. Le bien-nommé Arnold
Oborotov est venu sans Willy mais avec toute la panoplie du destructeur.
Hé ! Hé ! Sacré puncheur, le gaillard !


Tiens, puisque le mot est lâché,
voici Karim Ghajji sous les clameurs d'une foule "indubitablement" vouée
à sa cause. D'ailleurs, le garçon possède un palmarès qui en ferait rêver plus
d'un, soit 83 combats, 76 victoires dont 46 par KO. Athlétique et pétant de
santé, cet infatigable sportif va imposer un rythme à faire réfléchir un
marathonien kényan puis, parti dans son élan, il va passer la seconde et
démontrer à son opposant portugais, l'excellent Francisco Matos, pourquoi le
public scande son nom. Là encore, nous assisterons à une « sublime »
leçon orchestrée par 2 pointures, mais le titre Mondial sera remportée
unanimement par Karim.
Allez, l'annonce du dernier
entracte vient de retentir. Nous pouvons nous restaurer tout en appréciant une
« battle » de hip-hop. Les danseurs nous sortent un show de haute
volée. Ca tourne, ça break, ça pivote, ça freeze, ça scratche et ça repart en
Thomas. Ouais... du grand art !
Mais il est temps de regagner nos
places car Daniel – the Voice – nous présente le dernier fight et c'est sous un
tonnerre d'applaudissements que pénètre le champion de boxe thaï Albert Chey.
Une entrée que le jeune homme n'est pas prêt d'oublier : les gens sont
debout, ils hurlent son nom, l'ovationnent chaleureusement à un point tel que
l'on peut ressentir l'énergie fracasser les murs du 36 et, croyez-moi, le
gaillard va nous rendre au centuple ce qu'il vient de recevoir.
Pourtant, son
adversaire est un coriace, la preuve : à peine l'autorisation donnée par
l'arbitre, l'Ecossais entame les hostilités. Albert le tient à distance par des
Front kicks et le recadre par de claquants Middles. Le combat est d'une telle
intensité que les rounds 1 et 2 passent à la vitesse de l'éclair. Titre
intercontinental en jeu, l'affaire se corse en féroces empoignades, dont une
qui se finira carrément au sol !
A mi-combat, les deux boxeurs se
tiennent, ce qui oblige D.Macintosh à prendre des initiatives, mais, face à lui
: il a un faramineux technicien. Albert le dégonde dans la foulée d'une droite
à dérider un Shar-Peï centenaire, puis, il lui assène une série de low kicks à
« Buakawniser » une cuisse de Spartiate. Dieu que ce mec est
bon !
C'est bien simple : il va plier, dessouder et carburer un
Ecossais qui lui rendra, certes, la monnaie de sa pièce mais...
– car il y a un mais – pour moi,
pour nous et pour beaucoup, le boss, c'est Albert Chey !
Alors si (et cela n'engage que
moi) au terme de ce combat, j'ai vu un super Kick Boxeur en la présence de
David Macintosh, j'ai surtout applaudi, de l'autre côté du Ring, un combattant
hors norme. Voilà le ressenti d'un vieil adepte de cette magnifique
discipline.
De toute façon, peu importe la
décision car le véritable combat, c'est de prouver au monde que la symbiose est
une âme à deux corps. Devant l'esprit, le fair play et le mental de tout ces
compétiteurs, que pouvons-nous rajouter, si ce n'est « mission
accomplie » ! Cette rencontre nous a prouvé une fois encore que la
boxe thaï n'est pas un art conventionnel et, à l'aube d'une époque où des
politiques nous parles « ségrégation », « culture » et « couleur
de peau », il faut simplement leur répondre que nous, au sein des clubs...
... nous n'avons que des frères !
PHOTOS : JMi